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Scène 4. Croyez-moi ou pas (entre nous).

Scène 4. Croyez-moi ou pas (entre nous).

(Suite des Scènes 1 à 3)

Et croyez-moi ou pas, mais ce moment de passe. Entre nous, ce moment à passer : bon. Le plus souvent, bon, et même, si bon. Rarement dénué de charme. Rarement impersonnel. La douceur du feuillage qui respire au-dessus, la griffure des fourrés qui nous tancent au passage, et nous contre les troncs, debout, serrés, clandestins, la tête en allée dieu sait comment. Souvent, tendre. Parfois les prénoms sont dits, les habits glissés doucement, les sexes érigés, admirés, salués, sifflés comme des vedettes à leur entrée en scène. Et les valves du plaisir sont effleurées comme les cordes d’un violon trop longtemps resté dans un étui.

Promesse de grand concert. Galop d’essai d’un tournoi d’amour qui n’aura jamais lieu. Préliminaires en précipité, en arbre de Diane, sans chichis. Une passe est une promesse. Rêves d’un lit à baldaquins trop grand, recouvert de soie de rose usée. Courtisanes mirées dans la galerie des glaces d’un palais de quartier. Parfum de la poudre de riz, majesté d’encens profane qui accompagne mon abandon dans votre étreinte. Miroirs d’argent piqués, merveilleux bordel bleu passé ou à venir.

Croyez-moi ou pas, tout cela existe, a lieu des centaines, des milliers de fois chaque nuit. Pourquoi ne pas me croire plutôt que d’ânonner les sempiternels couplets inspirés par un vague remords (médiocre dégoût), par la crainte du déchoir ? Qui a déchu ici ? Qui est taché ? Quelle impureté nous a mordu, marquant d’une ecchymose violacée ? Fadaises. Foutaises. Laisser cela au musée des impostures morales. Ici simplement, la respiration s’appuie au ventre, je me suis appuyé à vous, nous avons esquissé une danse du bassin, si simplement, j’ai touché la peau gainée de vos jambes, et puis vos chevilles, le souffle file étoilé sans l’aide d’un ange, les yeux contractés, une musique soupirée, voilà tout.

Mais voilà tout. Grâce à vous.

Ce n’est pas cher payé, non. La passe est minutée, je sais, en principe. La passe exprime par excellence la loi du rapport sacré temps-argent. Mais en principe. En vrai, croyez-moi ou pas (Scène 4 et suivantes), dans votre ombre, pas même collé, ni prisonnier, ni addict, dans le sourire narquois et attendri de vos yeux, auprès des parfums opiacés de votre visage, je ne voyais pas le temps. Passer.

Papillon légèrement lourd. Saoulé des sucres de corolles décoratives.

Et vous,

bambi de bois bandé,

bombe et bombyx de ces bois.

A suivre