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Ici, on attend.

Ici, on attend. Au bord d’un sentier. Les mains dans les poches. Souvent des hommes entre deux âges.
La jeune femme blonde aux cheveux courts en penty, tapine-t-elle ? Celle à grosses lèvres qui m’observe depuis le siège de sa camionnette garée sur le parking de l’hippodrome, tapine, à l’évidence.
Les CRS assis dans leurs cars devant le Centre de Rétention Administrative, ils attendent aussi le client. Les manifestants qui incessamment seront là et que guettent l’hélicoptère qui tourne dans le ciel. Je me sens une tête d’activiste venu repérer les lieux avant une action, pas vraiment discret, je passe mon chemin, ce n’est pas aujourd’hui que je glisserai une mine incendiaire sous le car des flics.
C’est encore l’été. Le couple de vieux, assis côte à côte chacun dans son pliant, face au soleil, elle lit un livre, lui son journal, qu’attendent-il ? L’automne ? La mort ? D’être transformés en arbres pour mêler leurs ramures ?
L’arabe au visage vérolé, son sac en plastique à la main, sous un kiosque, attend-il une prophétie ?
Les trois filles qui promènent chacune un labrador, des élèves de l’école des chiens d’aveugles, bien sûr. C’est indiqué sur la camionnette qui les a amené là. Qui enseigne qui ? Les trois chiens ou les  trois filles ?
Un restaurant pas accueillant prés du lac de Gravelle. Le patron, en costard noir, serre avec componction la main à des habitués. Des vieux bourgeois. Mafieux rangés des voitures, anciens apaches, ultime génération d’imitateurs  de Jean Gabin.
La serveuse, les cheveux tirés en arrière, engoncée dans sa veste trop étroite. Presque naine. Dévouée à ses patrons selon toute apparence.
Course nocturne à Vincennes. Tous mardi et  vendredi soir. Entrée : trois euros.
Les pépés sur leurs vélos tournent dans le sens des aiguilles d’une montre. Ils discutent entre eux, accoudé à leur guidon comme d’autres à un comptoir. Parfois, ils cessent leur discussion. Un petit jeune a lancé un sprint et ils s’essoufflent à suivre le rythme nouveau.

Je devrais dresser la liste
-    des lieux où j’ai pleuré
-    des lieux où j’ai foutu
-    des lieux où j’ai saigné.

Qu’attendez-vous dans les bois ?
Qui attendez-vous dans les bois ?
Qu’attendez-vous des bois ?