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2021 - J'ai supprimé les oranges de mes menus - presse

affiche Qintetto Troia Vincenzopoursite

 Hotello - Véronique Hotte - 15 novembre 2021

J’ai supprimé les oranges de mes menus, textes de Liza Terrazzoni et Stéphane Olry, mise en scène de Stéphane Olry. Avec Sarah Chaumette, Catherine Jabot et Corine Miret.

Le public retrouve Corine Miret sur le plateau de scène surélevé de la salle des fêtes de Sevran, tenue d’ado non genré, perruque de cheveux courts, vêtue d’un sweat-shirt à capuche informe. 

Entre l’écran de son ordinateur projeté sur l’écran du lointain à partir duquel les spectateurs suivent pas à pas la démarche d’un projet artistique à soumettre aux instances du Théâtre public, divers dossiers et étapes de réflexion jalonnent la quête réfléchie du/de la jeune adolescent/e.

Aussi Camille rend-elle visite à sa grand-mère qui demeure à Sevran dans un Mobile Home garé dans un parc. Tous les samedis, pendant six ou sept semaines, elle prend le RER B, et nous la voyons marcher, grâce à la vidéo, sous les frondaisons verdoyantes des arbres du parc paysager.

La grand-mère est dotée d’un passé équivoque – art de la chanson populaire et culture du bon plaisir. Plus jeune, elle se produisait en chantant dans les bals populaires de l’époque, bars à filles et autres lieux troubles et glauques de prostitution dont il ne faut jamais dire le nom.

Blessures intérieures, trous noirs qu’on n’éclaircira jamais et qu’on ne veut surtout pas évoquer, toutes les familles sont aux prises avec leurs secrets cachés – non-dits criants et implicites coincés, entre longs silences des temps lointains et douleur des aveux inouïs dévoilés. Les membres d’une même famille doivent souvent sauter une génération ou deux pour accéder à la « connaissance » de ce qui ne veut pas se laisser savoir, et un petit-enfant parle mieux avec ses grands-parents qu’avec ses parents avec lequel les liens sont plus tendus et sensibles. Rejet de l’un, acceptation de l’autre, l’incompréhension des relations affectives s’installe pour longtemps.

L’apprenti/e metteur/e en scène de théâtre s’emploie à « creuser » dans son «histoire vraie », luttant contre le sentiment doux-amer d’arriver ou d’intervenir trop tard, les personnes concernées étant disparues ou bien se taisant, les témoins ne se souvenant plus, les documents étant perdus.

Comment obtenir le partage des souvenirs du petit-enfant à la grand-mère, par-delà le tabou familial ? Un héritage entre peur, sentiment de culpabilité et belle admiration inattendue, qui fait que celui qui part en quête d’un passé dont il est issu, décide aussi de ce qu’il fait de sa vie. Une façon de lutter contre l’effacement des secrets et les silences des vies ordinaires ou minuscules.

Sarah Chaumette en rude grand-mère décalée mais bien vivante et libre, s’en donne à coeur joie dans la moquerie et la dérision, tandis que sa voisine de mobile-home, jouée par Catherine Jabot, prend sa juste part de démence sénile savoureuse.

Douleur des séparations et des disparitions, la vie, entre souffrance et joie, poursuit son élan irréversible. Ainsi questionner son histoire et ses origines consiste non seulement en une manière de regarder le passé différemment, non pas pour chercher une version plus acceptable de soi et des siens, mais plutôt pour interroger la vie toujours et soi – présence existentielle au monde.

Véronique Hotte

 Toute la Culture - Margot Walemme - 16 novembre 2021

Conversation avec les Ancêtres, un triptyque présenté à Sevran

(...) J’ai supprimé les oranges de mes menus, le récit en héritage

Sur la scène de la salle des fêtes, le dernier tableau prend la forme d’une pièce de théâtre. On rencontre Éliane Moriss, ancienne chanteuse de cabaret juive Algérienne, que nous découvrons peu à peu. L’histoire, d’après de vrais témoignages manuscrits, nous touche, nous fait rire par son récit si personnel mais soigneusement transmis par Stéphane Olry. C’est la recherche d’un passé égaré, la rencontre avec une personne qui n’est plus avec nous et qui pourtant peut encore nous suivre et nous aider.

Vivez cette expérience unique le vendredi 19, le samedi 20 ou le dimanche 21 novembre à Sevran, plus d’info ici

 Margot Walemme